2019/06/20

A ma place de Tram (Métroscopie 7)

À ma place de tram
Je t’ai vue tout de suite alors que j’étais encore sur le quai
Comme j’étais pour une fois bien placé j’ai foncé vers toi
Tel le marin qui après un long périple retrouve sa fiancée
Tu m’as accueilli avec moelleux et délicatesse
Un peu comme si tu n’attendais que moi
J’ai senti sur moi les regards envieux de ceux restés debout,
Empêtrés dans leurs semblables.
J’étais bien, j’étais heureux.
Je pouvais voir le paysage.
Oh, il faisait encore nuit, mais les lumières des immeubles
Grâce à toi

Ressemblaient à des étoiles.
Je ne pensais pas encore que j’allais bosser
Et que je menais une vie de con plus stérile qu’un désert.
Toutes mes tensions avaient disparu
Mon mal de dos
Mes palpitations angoissantes
Mes démangeaisons eczémateuses
Voltigeaient loin derrière moi
Comme de vulgaires emballages
J’étais nouveau, j’étais flamboyant
Un lion en costard !
Et j’aurais bouffé la vie si je n’avais pas été aussi bien installé
Complètement vautré dans ton dossier
En tissu ambiance végétale
Mais je la bouffais en fait !
Carrément !
Sur toi !
Ensemble !
Cette vérité m’est apparue alors que j’arrivais à destination
C’est assis qu’on a le plus de poids
Et d’influence !
Assis qu’on est tout à fait soi
Et qu’on peut refaire le monde !
Assis et pas debout !
Mais déjà la sonnerie retentissait !
Je dus céder mon illumination
À un autre usager
Et suivre le troupeau.


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