Grande passerelle. Parfois, je suis frappé par
l’assurance avec laquelle les gens vont vers leur transport. Leur démarche,
l’expression de leur visage, leur regard, tout en eux
clame : « je suis là, j’existe et je sais où je vais et rien ni
personne ne m’empêchera d’y aller ! ». On croirait des immortels
bienheureux, satisfaits de l’ordre des choses et du monde. Moi, à côté, j’ai
l’air malade, piteux et renfrogné. Et si je cours c’est pour éviter de me faire
écraser par ceux qui me précèdent.
Comme je suis légèrement en retard, je me tape EXIL. En
face de moi, une femme ronde aux cheveux courts et teints lit les programmes TV
de la semaine. Quand, dès le lundi matin, je vois quelqu’un faire ça, j’ai peur
et je déprime. Qui sait si un jour je ne ferai pas la même chose, n’attendant
plus rien de la vie, sinon les inepties du petit écran. Dans le ciel, un soleil
africain s’élève. Parfois, ses rayons orangés transpercent le wagon, illuminant
les visages fermés comme des poings. Si la beauté s’épanouissait dans l’allée,
personne n’y prêterait attention. Seul compte l’allure de notre RER et le temps
passé à chacun des arrêts. Rien d’autre.
Dans le métro, trois adolescentes font une revue de
presse. Elles sont souriantes et pimpantes et je ne serais pas surpris de les
voir un jour présenter le JT. Souriant à mon tour, j’imagine ce jour où, tout
fier, je dirais à mes amis : « Vous voyez ces filles à la
télé ? Eh bien, je les ai vues débuter sur la ligne 6 »
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