Pour elle, le sexe était
devenu une corvée. La faute à la libido exacerbée de Guy. Depuis qu’ils étaient
ensemble (trente et un ans maintenant !), ils avaient fait l’amour pratiquement
tous les jours. Si ça n’avait tenu qu’à elle, une fois tous les trois mois
aurait suffi. Hélas, pas pour son mari qui lui avait fait comprendre qu’il ne
survivrait pas à ce régime. « Ce serait comme une castration » lui
avait-il expliqué avec un air de chien opéré justement.
Cependant, une fois, pour
faire plaisir à sa femme, il avait accepté de se retenir. Cela avait duré en
tout et pour tout soixante-neuf heures. Si au départ, il avait fait preuve
d’enthousiasme, très vite son humeur avait changée. Dès le deuxième jour
d’abstinence, Guy s’était montré bougon puis franchement désagréable avec
Catherine. Tout était prétexte à l’admonester. Son rangement confus, ses choix
de programmes TV, ses manières trop « délicates ». Bientôt,
l’atmosphère dans la maison était devenue intenable. Exaspérée par les
remarques répétées et désobligeantes de son mari, Catherine avait failli à
plusieurs reprises l’envoyer paître. Notamment lui dire de se masturber si
cette parenthèse sexuelle le rendait malade. Cependant, elle savait à l’avance
que c’était un coup dans l’eau puisqu’elle l’avait entendu se palucher dans les
toilettes dès les cinq premières heures du premier jour vertueux. Aussi avait-elle
gardé pour elle ses piques et avait-elle rendu les armes à approximativement
vingt et une heures, au moment des résultats du loto (à son grand désarroi,
elle n’avait obtenu aucun numéro gagnant, c’était décidément un jour de mauvais
tirage). Elle avait préféré avoir la paix plutôt que de batailler sans relâche
Après l’acte, Guy avait
regagné le sourire. Néanmoins, il avait avoué avec émotion à sa femme que ces
trois jours loin de son antre avaient été une torture pour lui. Il s’était
senti comme un moine et avait vu son pénis se flétrir à cause de cette diète
forcée
« Tu te rends compte,
j’ai perdu cinq millimètres de vigueur » avait-il dit en se tripotant le
bout. « Que se serait-il passé si on avait prolongé le calvaire ?
Popaul se serait certainement ratatiné. Tu sais, comme lorsqu’il est plongé
dans l’eau froide. Un machin informe, ridicule, comme une excroissance de
chair. Et je suis certain que ça aurait été irréversible au bout d’un moment.
Je n’aurais plus jamais réussi à faire preuve de virilité. La pire déchéance
qui soit à mes yeux ». Et d’un regard de martyre, il avait laissé entendre
à Catherine l’issue funeste qui s’ensuivrait.
(À
suivre)
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