2022/01/12

Critique de 3 bédés par Nicolas Anelka (Oh non encore du foot)

 

 


 

Si, au sein de l’attaque française, Franck Ribéry est passionné de littérature, Nicolas Anelka raffole des bandes dessinées. Il n’est pas un jour sans que l’attaquant  en dévore une. Sur le terrain, lorsque l’homme n’accomplit pas son travail défensif, ses coéquipiers le rappellent à ses devoirs souvent par cette phrase : « Eh ! Oh ! T’es pas en train de lire une bédé, là ! ». Phrase qui fait sourire le joueur dont le regard brillant semble dire avec un soupçon d’insolence : «  Et qu’est-ce qui vous dit que je suis pas en train d’en lire une, de bédé ? »

 

Aujourd’hui, trois bédés au programme que j’ai lu lors de déplacements en bus.

 

Le tome 1 de 100 bullets (dos rond pour le daron) de Brian Azzarello et Eduardo Risso :  Ouais, bon book, avec une bonne atmosphère. De la gueule fracasse à donf, de l’action comme y faut, des dessins qui déchirent. Un mystérieux agent remet à un jeune branleur des balles et flingue. Le gamin a le choix, soit de flinguer son daron, soit de renouer des liens avec lui… L’histoire a une suite et si je la trouve, je peux vous dire que je me jette dessus, fissa !... Qui est ce mystérieux agent qui refile un flingue et des balles au gamin ? Que veut-il ? Qui est le dur de la fin de l’histoire qui reconnait le flingue et donc connait le mystérieux agent ? Le jeune branleur va-t-il se dépêtrer de cette sale histoire ?... Autant de questions qui, je l’espère, auront des réponses à la hauteur de ce début tonitruant et prometteur dans les tomes qui suivent…

 

Le tome 1 de Notes (born to be a larve) de Boulet : Là, aussi, j’ai accroché. Autre genre. BD indépendante. Ce recueil est une adaptation de blog bédé. Bon, si y’a le côté un peu soulant de l’auteur de bédé qui raconte le petit monde de la bédé (les festivals, le bouclage d’un livre…), l’autodérision permanente permet de rendre cela digeste (parce que les auteurs de bédés qui racontent leurs journées bédés y’en a des masses et souvent y’a pas grand intérêt, ce serait comme si une masse de joueurs de football se mettaient à décrire leurs entraînements, une passe, un penalty, l’achat de leurs nouvelles bagnoles, les douches, tout ça, tout ça, à la fin, bonjour l’overdose !). L’autre intérêt de ce bouquin est que, suivant les histoires, les dessins sont différents. On a l’impression que l’auteur expérimente des styles, ça a un côté laboratoire qui me plait bien. Coup de cœur pour l’histoire sur le bouddhisme, drôle et fine.

 

From Hell d’Alan Moore et je sais plus qui : Alors là, on a beau me dire que c’est une super bédé, j’aime pas. Trop de personnages, dessins volontairement confus mais confus quand même au final – monologues imbitables à n’en plus finir – Seuls quelques passages forts m’ont permis d’arriver jusqu’à la 200ème page – mais franchement, cette histoire de francs maçons et de complot me dépasse et me gave. En plus, il n’y a que les anglais pour se préoccuper de la famille royale, le reste du monde s’en bat. Quant aux monologues érudits, au bout d’un moment, ça plombe l’histoire. On en a très vite plus rien à foutre des motivations du chirurgien (les comprend-il lui-même ?). Et on a aussi très vite envie de refermer le bouquin pour taper du cuir avec les potes. Ou pour manger une raclette avec eux, oui, tiens ce serait pas mal ça, une bonne petite raclette… (From Hell, à prêter à Raymond Domenech)

2022/01/11

abattoir (dessin dépressif 43)


 

Critique de mes prix littéraires de Thomas Bernhard par Franck Ribéry (Oh non encore du foot)

 


 

Ce n’est pas un secret, Franck Ribéry adore lire. Lors du scandale Zahia, il avouera aux policiers que la passe offerte par ses amis pour son anniversaire ne fut pas consommée. Ou plutôt consommée d’une manière particulière. En effet, Zahia lui fit la lecture d’un roman de John Fante à haute voix pendant toute la nuit. Cependant, pour ne pas passer pour une lopette auprès de ses collègues footballeurs, il demandera aux agents de taire la vérité. Aujourd’hui pour OH NON ENCORE DU FOOT !, Franck nous parle du livre de Thomas Bernhard : Mes prix littéraires.

 

Pour la coupe du monde, je voulais emmener des bouquins pas trop épais pour ne pas avoir de bagages trop lourds. « Mes prix littéraires » de Thomas Bernhard était adéquat. Petit format et fin, à déguster pendant les déplacements en avion ou en car ou sur le banc des remplaçants ou pendant la douche (à condition d’avoir les bras longs et qu’un partenaire vous savonne). J’étais d’autant plus enthousiaste à le lire que j’avais aimé « le neveu du Wittgenstein » du même auteur.

Je n’ai pas été déçu. Tout au long de sa carrière, Thomas Bernhard a gagné de nombreux prix. Dans ce livre, il nous relate ces remises de prix qui sont à la fois étonnamment burlesques et pathétiques. Dès le premier récit, le ton est donné : Alors qu’il ne s’y attendait pas, Thomas Berhnard apprend qu’il a gagné le prix Grillparzer de l’académie des sciences. Afin de marquer le coup, il file illico chez sir Anthony pour s’acheter un costume très cher (l’homme porte depuis des années le même pull et pantalon). Ainsi, dans ce costume tout neuf et tout beau, il va donc avec sa tante de 81 ans (qui à ses yeux est resplendissante) au fameux prix. Et là, personne ne l’accueille. Dans la salle comble, les gens vont et viennent, bavardent, mais personne ne fait attention à lui. Thomas Bernhard décide donc de s’asseoir au milieu du public et de laisser débuter la cérémonie… Tout le bouquin est du même tonneau. Chaque nouvelle remise de prix est une épreuve pour l’auteur, qui se plie à la farce uniquement pour toucher un peu d’argent. Lorsqu’il ne se retrouve pas dans une situation délicate, Thomas Bernhard doit supporter la bêtise et l’ignorance des organisateurs non sans mal et sans remords. Bref, son œil acéré, impitoyable avec les autres et lui-même, fait voler en éclats la comédie que se jouent les hommes en société. C’est à la fois désespérant et très drôle. Plus très drôle que désespérant cependant... A la fin du premier récit, Thomas Bernhard estimera que le costume acheté chez sir Anthony était trop petit pour lui. Il retournera dans la boutique de luxe pour l’échanger. L’idée saugrenue qu’une personne achètera le costume rendu sans savoir qu’il a été porté lors du prix Grillparzer de l’académie des sciences le consolera des humiliations subies lors de cette cérémonie.

2022/01/10

Critique de "Le scandale du Père Brown" de Chesterton par Franck Ribéry (Oh non encore du foot)

 

 



 

Outre ses qualités sportives, Franck Ribéry est un passionné de littérature. Sur les stades il sourit avec sympathie quand ses collègues l'appellent « l'intello » ou « Bernard Pivot » ; Il sourit, car sans avoir aucune prétention, il sait qu'il a lu plus de livres qu'il n'y a de brins d'herbes sur le terrain. Pour OH NON ENCORE DU FOOT, il nous fait part de ses dernières lectures avec la culture encyclopédique qui est la sienne.

 

Les critiques littéraires, à chaque nouveau commentaire sur un polar, se targuent tous de rappeler combien injustement le genre policier est méprisé. Ceci est un mythe bien ancré. Le genre policier, n'a JAMAIS été méprisé.

Ca serait comme de prétendre qu'au moyen âge, le roman de la rose, et toute la littérature de chevalerie, sous prétexte qu'elle visait à la distraction était secondaire. C'était faux à l'époque et ce le fut aussi concernant le roman policier.

Comment peuvent-ils prétendre qu'on ait pu mépriser un genre qui fut inventé par Edgar Alan Poe, et qui a acquis sa noblesse par Agatha Christie. Non! Dès son apparition, le roman policier a été immédiatement reconnu en tant qu'art, et on ne doit qu'aux bibliothécaires (et aux passionnés) le fait qu'il soit classé à part de la littérature traditionnelle.

Par contre, il est vrai qu'il y a beaucoup de mauvais auteurs de roman policier. Mais sans doute à peine plus que dans le roman traditionnel.

Chesterton est un très bon auteur de polar. Et il est d'autant plus symptomatique, qu'il a bousculé les codes de se genre tous mis en place dans « le double crime de la rue morgue »: Un enquêteur brillant, un adjoint un peu bête, une multitude d'indices contradictoires et une solution par déduction successive. Le Père Brown, n'est pas comme cela. D'abord, il agit seul. Il est plus humaniste que brillant. Et il découvre le coupable sans enquête.

 

Dans chacune des nouvelles qui constituent le « scandale du Père Brown », la résolution évidente, est obtenue par un simple évènement illogique : Une phrase que seul le coupable pouvait prononcer ; un crime trop compliqué, qui se révèle être une mascarade sans meurtre ; un témoin qui a injustement confondu la victime et le coupable sur leur apparence, etc.

En bref, au bout de 5 phrases où le père Brown apparaît dans l'enquête, il a déjà trouvé le coupable, et un lecteur très consciencieux, peut le trouver aussi. On est loin des multitudes d'indices d'un Conan Doyle, des complications psychologiques d'Agatha Christie, et en général de l'astuce employée par les auteurs qui consiste toujours à rajouter des détails inutiles pour rendre ardu la résolution du crime.

Ajouté à cela, le caractère bon enfant, un peu ridicule et jamais moralisateur du père Brown, et on peut regretter qu'il n'y eut pas plus d'écrivains inspirés de Chesterton pour nous donner des polars light, des enquêtes brillantes dans leur simplicité, et un plaisir pur de création logique.

 

En bref, Chesterton est au roman policier ce qu'est le « but en or » au football : Une fulgurance évidente, une nouveauté efficace, qui a rendu toutes sa pêche à un sport qui s'enlisait dans les atermoiements défensif, et les tirs en touche.

 

Franck Ribéry

 

2022/01/08

Critique des films The Punisher par Raymond Domenech (Oh non encore du foot)

 


 Le grand rêve de Raymond Domenech a toujours été de devenir critique de cinéma. Hélas, lorsqu’il a remarqué que sélectionneur de l’équipe de France était nettement mieux payé que cette profession, il a vite tranché. Heureusement, pour OH NON ENCORE DU FOOT, l’homme a accepté de nous parler gratuitement (si, si) des films qu’il a vu, réalisant ainsi son vieux rêve le temps de quelques billets. Aujourd’hui, les deux films sur le Punisher, cru 2004 et 2007.

 

Nicolas Anelka m’a tanné pour que je parle de ces deux films qui ne sont pas des chefs d’œuvre, donc j’en parle – Bien. Deux films sur le héros de comic sont sortis au cinéma, l’un en 2004, l’autre en 2007. Le premier est joué par un blondinet bodybuildé, le deuxième par un brun limite grassouillet avec une gueule de boucher. Avec un tel casting, on pourrait croire a priori que le deuxième film collerait plus à la bédé et à son univers sombre, éh bien non. Autant le film de 2004 est réussi autant celui de 2007 ressemble à une farce grotesque. Dans le premier, Franck Castle alias le Punisher voit sous ses yeux son fils et sa femme assassinés par des maffieux aux ordres de John Travolta. Survivant miraculeusement à leur attaque, il décide de se venger. Deux scènes rendent ce film intéressant – lorsqu’un tueur muni d’une guitare vient narguer Franck Castle dans un snack (s’ensuit une course poursuite infernale en voiture), lorsqu’un autre tueur, colosse russe semblant être sorti tout droit d’un dessin animé, vient éliminer le héros chez lui. Bref, rien que pour ces deux scènes, ce film d’action vaut le coup. Pour l’autre film – à moins de vouloir se payer une franche rigolade – pas la peine de s’abimer les yeux. Le fils et la femme de Franck Castle sont morts depuis belle lurette. Alone, notre héros dégomme du mafieux à la queue leu leu. L’acteur qui joue Franck Castle est mauvais. A part deux ou trois grimaces qui se veulent viriles, son jeu est nul (il ferait mieux de nous servir des côtes de porc). D’ailleurs tous les acteurs de ce film sont mauvais. Etonnamment, même celui qui pourtant assurait dans la série The Wire. Néanmoins comme le scénario du film est mauvais, on n’est pas trop choqué. Une scène résume à merveille cette daube au titre racoleur : War Zone : A la fin, les deux méchants tiennent en otages une mère et sa fille. Le punisher est désarmé, blessé, à la merci de ses ennemis. L’un des méchants décide soudain de lui balancer une arme contenant une seule balle pour qu’il choisisse de tuer soit la fille, soit la mère… On croirait presque la série animée des Simpsons si les morts ne s’accumulaient pas et les protagonistes ne faisaient pas autant la gueule.

2022/01/02

Critique de Windows on the world de Frédéric Beigbeder par Franck Ribéry (Oh non encore du foot)

 

Pourquoi Franck Ribéry fait si peu de têtes ? Parce qu’il sait que chaque coup donné au ballon fait perdre des neurones et que ces neurones perdus sont autant de pages de littérature envolées. Aujourd’hui, pour OH NON ENCORE DU FOOT ! Franck nous parle du livre de Frédéric Beigbeder : Windows on the world.

 

J’avais commencé du même auteur 99 francs et ça m’avait vite gavé. Pas allé au bout. J’avais ensuite vu le film et là, j’avais accroché – puis, il n’y a longtemps, me souvenant de l’avoir trouvé drôle, j’avais décidé de le revoir. J’ai vite décroché – même gavage que le livre – A part pour la scène de « rupture » dite dans toutes les langues. Bref, sans beaucoup d’enthousiasme, j’ai attaqué Windows on the world – qui aborde les attentats du 11 septembre – donc un sujet bien casse-gueule, qui exige que l’auteur qui s’y colle en ait dans l’estomac. Et là, bien forcé de constater que Frédéric Beigbeder n’en a pas de l’estomac. Le récit qui alterne entre les voix de personnages prisonniers dans le World Trade Center et celle de l’auteur « enquêtant » sur l’attentat reste lisse et superficiel – On ne croit pas au personnage du père texan, double en pensées de l’auteur. On ne croit pas aux derniers instants de ces victimes de l’attentat. Il manque quelque chose. Et ce quelque chose est sans doute cette force qui rend charnus les mots, qui les propulse en éclats virevoltants dans l’imaginaire du lecteur. Frédéric Beigbeder écrit bien comme je pourrais dire qu’il écrit poliment. Des formules à la Oscar Wilde (et dieu sait que les formules d’Oscar Wilde sont chiantes), des références tapageuses, des anecdotes croustillantes, un soupçon de culture (arf, les éternelles citations de « grands hommes ») – L’auteur use de tous ces artifices pour rendre intéressant son récit qui ne l’est pas – ou, si par moments, il faut quand même le reconnaitre. Et ces moments sont quand l’auteur se raconte – alors là, oui, le récit fonctionne, hélas, à petites doses, insuffisantes pour donner à l’ensemble une réelle profondeur.

Tout ceci dit, j’ai lu le bouquin jusqu’au bout (mystère à élucider : Bien qu’il ne nous plaise pas, pour quelle raison lit-on un livre complètement ?). Bien pour la plage après une semaine de vacances au même endroit ou un match amical à domicile. Vaut une huitième passe en retrait à son gardien sous les sifflets du public.

 

2022/01/01

Critique de Survivant de Chuck Palahniuk par Franck Ribéry (Oh non encore du foot)

 


 

Franck Ribéry est un lecteur invétéré. A chaque mi-temps d’un match, pour donner de l’allant à ses coéquipiers, l’homme lit à haute voix des extraits de roman ou de poésie. Comme il le dit si bien lui-même : « On ne peut jouer au foot comme un artiste sans fréquenter les mots de ceux qui savent leur donner chair ». Aujourd’hui : Franck nous rapporte sa lecture de « Survivant » de Chuck Palahniuk.

 

Quelques années auparavant, j’avais lu Fight Club du même auteur et je m’étais fait profondément chier (et pourtant je l’avais lu jusqu’au bout, époque où je me forçais à lire même les livres qui m’emmerdaient, époque heureusement révolue). Impression de lire un scénar de film. D’ailleurs, le film m’avait semblé nettement meilleur que le bouquin dont je n’avais pas du tout saisi l’humour ravageur. Quand Thierry Henry m’a tendu « Survivant », deuxième bouquin de Chuck Palahniuk, j’étais donc légitiment sceptique. « Tu me fais une blague ? » lui avais-je demandé, connaissant l’esprit facétieux du joueur mais aussi de l’homme. Sans répondre, Thierry avait souri puis remué son bras tendu, insistant pour que je prenne le book. Ma curiosité était trop forte. J’avais pris le book et l’avais lu. D’un trait. Sans prendre le temps de me changer (je me souviens encore de la couleur de la serviette que j’avais enroulée autour de la taille : verte à pois bleus). Comme quoi, les œuvres d’un même auteur peuvent susciter des réactions contraires. Autant je suis partisan de ne pas lire jusqu’au bout un bouquin qui est chiant, autant, j’approuve qu’on donne plusieurs chances à un auteur, même si ses œuvres précédentes étaient nazes – exceptions faites de Beigbeder, Levy et autres Jardin (un seul être doit se cacher derrière ces trois noms, encore un coup de Fantomas !)…

« Survivant » m’a donc captivé de A à Z. Début sur des chapeaux de roues, le narrateur a pris les commandes d’un avion long courrier. Il a viré les passagers ainsi que les pilotes. Son but : se scratcher dans le désert australien. Mais avant de se scratcher, il va raconter « à la boite noire » comment il en est arrivé là…

Persos zarbis, atmosphère délétère (glauque ?), violence maximale, humour dévastateur, ce bouquin ressemble à une grenade qui vous pète à la gueule sans en avoir l’air. Plusieurs fois. Certaines scènes sont vraiment démentes, et c’est l’une des rares fois où je me suis demandé comment l’auteur avait fait pour imaginer de tels trucs. Je me suis aussi demandé si l’auteur, avec cet écrit qui ne ressemble vraiment à aucun autre et qui est inclassable, n’était pas majeur, à l’instar d’un Bret Easton Ellis (surtout pour American Psycho).

Bref, j’ai hâte de me pencher sur ses autres œuvres, notamment Monstres Invisibles que m’a aussi conseillé Thierry.

En tout cas, c’est un réel plaisir de tomber sur ce genre bouquin.

Si je le convertissais en geste technique, je dirais qu’il vaut bien une reprise de volée en pleine lucarne !

Non, deux ! Soyons pas pingre.