2022/01/11

Critique de mes prix littéraires de Thomas Bernhard par Franck Ribéry (Oh non encore du foot)

 


 

Ce n’est pas un secret, Franck Ribéry adore lire. Lors du scandale Zahia, il avouera aux policiers que la passe offerte par ses amis pour son anniversaire ne fut pas consommée. Ou plutôt consommée d’une manière particulière. En effet, Zahia lui fit la lecture d’un roman de John Fante à haute voix pendant toute la nuit. Cependant, pour ne pas passer pour une lopette auprès de ses collègues footballeurs, il demandera aux agents de taire la vérité. Aujourd’hui pour OH NON ENCORE DU FOOT !, Franck nous parle du livre de Thomas Bernhard : Mes prix littéraires.

 

Pour la coupe du monde, je voulais emmener des bouquins pas trop épais pour ne pas avoir de bagages trop lourds. « Mes prix littéraires » de Thomas Bernhard était adéquat. Petit format et fin, à déguster pendant les déplacements en avion ou en car ou sur le banc des remplaçants ou pendant la douche (à condition d’avoir les bras longs et qu’un partenaire vous savonne). J’étais d’autant plus enthousiaste à le lire que j’avais aimé « le neveu du Wittgenstein » du même auteur.

Je n’ai pas été déçu. Tout au long de sa carrière, Thomas Bernhard a gagné de nombreux prix. Dans ce livre, il nous relate ces remises de prix qui sont à la fois étonnamment burlesques et pathétiques. Dès le premier récit, le ton est donné : Alors qu’il ne s’y attendait pas, Thomas Berhnard apprend qu’il a gagné le prix Grillparzer de l’académie des sciences. Afin de marquer le coup, il file illico chez sir Anthony pour s’acheter un costume très cher (l’homme porte depuis des années le même pull et pantalon). Ainsi, dans ce costume tout neuf et tout beau, il va donc avec sa tante de 81 ans (qui à ses yeux est resplendissante) au fameux prix. Et là, personne ne l’accueille. Dans la salle comble, les gens vont et viennent, bavardent, mais personne ne fait attention à lui. Thomas Bernhard décide donc de s’asseoir au milieu du public et de laisser débuter la cérémonie… Tout le bouquin est du même tonneau. Chaque nouvelle remise de prix est une épreuve pour l’auteur, qui se plie à la farce uniquement pour toucher un peu d’argent. Lorsqu’il ne se retrouve pas dans une situation délicate, Thomas Bernhard doit supporter la bêtise et l’ignorance des organisateurs non sans mal et sans remords. Bref, son œil acéré, impitoyable avec les autres et lui-même, fait voler en éclats la comédie que se jouent les hommes en société. C’est à la fois désespérant et très drôle. Plus très drôle que désespérant cependant... A la fin du premier récit, Thomas Bernhard estimera que le costume acheté chez sir Anthony était trop petit pour lui. Il retournera dans la boutique de luxe pour l’échanger. L’idée saugrenue qu’une personne achètera le costume rendu sans savoir qu’il a été porté lors du prix Grillparzer de l’académie des sciences le consolera des humiliations subies lors de cette cérémonie.

2022/01/10

Critique de "Le scandale du Père Brown" de Chesterton par Franck Ribéry (Oh non encore du foot)

 

 



 

Outre ses qualités sportives, Franck Ribéry est un passionné de littérature. Sur les stades il sourit avec sympathie quand ses collègues l'appellent « l'intello » ou « Bernard Pivot » ; Il sourit, car sans avoir aucune prétention, il sait qu'il a lu plus de livres qu'il n'y a de brins d'herbes sur le terrain. Pour OH NON ENCORE DU FOOT, il nous fait part de ses dernières lectures avec la culture encyclopédique qui est la sienne.

 

Les critiques littéraires, à chaque nouveau commentaire sur un polar, se targuent tous de rappeler combien injustement le genre policier est méprisé. Ceci est un mythe bien ancré. Le genre policier, n'a JAMAIS été méprisé.

Ca serait comme de prétendre qu'au moyen âge, le roman de la rose, et toute la littérature de chevalerie, sous prétexte qu'elle visait à la distraction était secondaire. C'était faux à l'époque et ce le fut aussi concernant le roman policier.

Comment peuvent-ils prétendre qu'on ait pu mépriser un genre qui fut inventé par Edgar Alan Poe, et qui a acquis sa noblesse par Agatha Christie. Non! Dès son apparition, le roman policier a été immédiatement reconnu en tant qu'art, et on ne doit qu'aux bibliothécaires (et aux passionnés) le fait qu'il soit classé à part de la littérature traditionnelle.

Par contre, il est vrai qu'il y a beaucoup de mauvais auteurs de roman policier. Mais sans doute à peine plus que dans le roman traditionnel.

Chesterton est un très bon auteur de polar. Et il est d'autant plus symptomatique, qu'il a bousculé les codes de se genre tous mis en place dans « le double crime de la rue morgue »: Un enquêteur brillant, un adjoint un peu bête, une multitude d'indices contradictoires et une solution par déduction successive. Le Père Brown, n'est pas comme cela. D'abord, il agit seul. Il est plus humaniste que brillant. Et il découvre le coupable sans enquête.

 

Dans chacune des nouvelles qui constituent le « scandale du Père Brown », la résolution évidente, est obtenue par un simple évènement illogique : Une phrase que seul le coupable pouvait prononcer ; un crime trop compliqué, qui se révèle être une mascarade sans meurtre ; un témoin qui a injustement confondu la victime et le coupable sur leur apparence, etc.

En bref, au bout de 5 phrases où le père Brown apparaît dans l'enquête, il a déjà trouvé le coupable, et un lecteur très consciencieux, peut le trouver aussi. On est loin des multitudes d'indices d'un Conan Doyle, des complications psychologiques d'Agatha Christie, et en général de l'astuce employée par les auteurs qui consiste toujours à rajouter des détails inutiles pour rendre ardu la résolution du crime.

Ajouté à cela, le caractère bon enfant, un peu ridicule et jamais moralisateur du père Brown, et on peut regretter qu'il n'y eut pas plus d'écrivains inspirés de Chesterton pour nous donner des polars light, des enquêtes brillantes dans leur simplicité, et un plaisir pur de création logique.

 

En bref, Chesterton est au roman policier ce qu'est le « but en or » au football : Une fulgurance évidente, une nouveauté efficace, qui a rendu toutes sa pêche à un sport qui s'enlisait dans les atermoiements défensif, et les tirs en touche.

 

Franck Ribéry

 

2022/01/08

Critique des films The Punisher par Raymond Domenech (Oh non encore du foot)

 


 Le grand rêve de Raymond Domenech a toujours été de devenir critique de cinéma. Hélas, lorsqu’il a remarqué que sélectionneur de l’équipe de France était nettement mieux payé que cette profession, il a vite tranché. Heureusement, pour OH NON ENCORE DU FOOT, l’homme a accepté de nous parler gratuitement (si, si) des films qu’il a vu, réalisant ainsi son vieux rêve le temps de quelques billets. Aujourd’hui, les deux films sur le Punisher, cru 2004 et 2007.

 

Nicolas Anelka m’a tanné pour que je parle de ces deux films qui ne sont pas des chefs d’œuvre, donc j’en parle – Bien. Deux films sur le héros de comic sont sortis au cinéma, l’un en 2004, l’autre en 2007. Le premier est joué par un blondinet bodybuildé, le deuxième par un brun limite grassouillet avec une gueule de boucher. Avec un tel casting, on pourrait croire a priori que le deuxième film collerait plus à la bédé et à son univers sombre, éh bien non. Autant le film de 2004 est réussi autant celui de 2007 ressemble à une farce grotesque. Dans le premier, Franck Castle alias le Punisher voit sous ses yeux son fils et sa femme assassinés par des maffieux aux ordres de John Travolta. Survivant miraculeusement à leur attaque, il décide de se venger. Deux scènes rendent ce film intéressant – lorsqu’un tueur muni d’une guitare vient narguer Franck Castle dans un snack (s’ensuit une course poursuite infernale en voiture), lorsqu’un autre tueur, colosse russe semblant être sorti tout droit d’un dessin animé, vient éliminer le héros chez lui. Bref, rien que pour ces deux scènes, ce film d’action vaut le coup. Pour l’autre film – à moins de vouloir se payer une franche rigolade – pas la peine de s’abimer les yeux. Le fils et la femme de Franck Castle sont morts depuis belle lurette. Alone, notre héros dégomme du mafieux à la queue leu leu. L’acteur qui joue Franck Castle est mauvais. A part deux ou trois grimaces qui se veulent viriles, son jeu est nul (il ferait mieux de nous servir des côtes de porc). D’ailleurs tous les acteurs de ce film sont mauvais. Etonnamment, même celui qui pourtant assurait dans la série The Wire. Néanmoins comme le scénario du film est mauvais, on n’est pas trop choqué. Une scène résume à merveille cette daube au titre racoleur : War Zone : A la fin, les deux méchants tiennent en otages une mère et sa fille. Le punisher est désarmé, blessé, à la merci de ses ennemis. L’un des méchants décide soudain de lui balancer une arme contenant une seule balle pour qu’il choisisse de tuer soit la fille, soit la mère… On croirait presque la série animée des Simpsons si les morts ne s’accumulaient pas et les protagonistes ne faisaient pas autant la gueule.

2022/01/02

Critique de Windows on the world de Frédéric Beigbeder par Franck Ribéry (Oh non encore du foot)

 

Pourquoi Franck Ribéry fait si peu de têtes ? Parce qu’il sait que chaque coup donné au ballon fait perdre des neurones et que ces neurones perdus sont autant de pages de littérature envolées. Aujourd’hui, pour OH NON ENCORE DU FOOT ! Franck nous parle du livre de Frédéric Beigbeder : Windows on the world.

 

J’avais commencé du même auteur 99 francs et ça m’avait vite gavé. Pas allé au bout. J’avais ensuite vu le film et là, j’avais accroché – puis, il n’y a longtemps, me souvenant de l’avoir trouvé drôle, j’avais décidé de le revoir. J’ai vite décroché – même gavage que le livre – A part pour la scène de « rupture » dite dans toutes les langues. Bref, sans beaucoup d’enthousiasme, j’ai attaqué Windows on the world – qui aborde les attentats du 11 septembre – donc un sujet bien casse-gueule, qui exige que l’auteur qui s’y colle en ait dans l’estomac. Et là, bien forcé de constater que Frédéric Beigbeder n’en a pas de l’estomac. Le récit qui alterne entre les voix de personnages prisonniers dans le World Trade Center et celle de l’auteur « enquêtant » sur l’attentat reste lisse et superficiel – On ne croit pas au personnage du père texan, double en pensées de l’auteur. On ne croit pas aux derniers instants de ces victimes de l’attentat. Il manque quelque chose. Et ce quelque chose est sans doute cette force qui rend charnus les mots, qui les propulse en éclats virevoltants dans l’imaginaire du lecteur. Frédéric Beigbeder écrit bien comme je pourrais dire qu’il écrit poliment. Des formules à la Oscar Wilde (et dieu sait que les formules d’Oscar Wilde sont chiantes), des références tapageuses, des anecdotes croustillantes, un soupçon de culture (arf, les éternelles citations de « grands hommes ») – L’auteur use de tous ces artifices pour rendre intéressant son récit qui ne l’est pas – ou, si par moments, il faut quand même le reconnaitre. Et ces moments sont quand l’auteur se raconte – alors là, oui, le récit fonctionne, hélas, à petites doses, insuffisantes pour donner à l’ensemble une réelle profondeur.

Tout ceci dit, j’ai lu le bouquin jusqu’au bout (mystère à élucider : Bien qu’il ne nous plaise pas, pour quelle raison lit-on un livre complètement ?). Bien pour la plage après une semaine de vacances au même endroit ou un match amical à domicile. Vaut une huitième passe en retrait à son gardien sous les sifflets du public.

 

2022/01/01

Critique de Survivant de Chuck Palahniuk par Franck Ribéry (Oh non encore du foot)

 


 

Franck Ribéry est un lecteur invétéré. A chaque mi-temps d’un match, pour donner de l’allant à ses coéquipiers, l’homme lit à haute voix des extraits de roman ou de poésie. Comme il le dit si bien lui-même : « On ne peut jouer au foot comme un artiste sans fréquenter les mots de ceux qui savent leur donner chair ». Aujourd’hui : Franck nous rapporte sa lecture de « Survivant » de Chuck Palahniuk.

 

Quelques années auparavant, j’avais lu Fight Club du même auteur et je m’étais fait profondément chier (et pourtant je l’avais lu jusqu’au bout, époque où je me forçais à lire même les livres qui m’emmerdaient, époque heureusement révolue). Impression de lire un scénar de film. D’ailleurs, le film m’avait semblé nettement meilleur que le bouquin dont je n’avais pas du tout saisi l’humour ravageur. Quand Thierry Henry m’a tendu « Survivant », deuxième bouquin de Chuck Palahniuk, j’étais donc légitiment sceptique. « Tu me fais une blague ? » lui avais-je demandé, connaissant l’esprit facétieux du joueur mais aussi de l’homme. Sans répondre, Thierry avait souri puis remué son bras tendu, insistant pour que je prenne le book. Ma curiosité était trop forte. J’avais pris le book et l’avais lu. D’un trait. Sans prendre le temps de me changer (je me souviens encore de la couleur de la serviette que j’avais enroulée autour de la taille : verte à pois bleus). Comme quoi, les œuvres d’un même auteur peuvent susciter des réactions contraires. Autant je suis partisan de ne pas lire jusqu’au bout un bouquin qui est chiant, autant, j’approuve qu’on donne plusieurs chances à un auteur, même si ses œuvres précédentes étaient nazes – exceptions faites de Beigbeder, Levy et autres Jardin (un seul être doit se cacher derrière ces trois noms, encore un coup de Fantomas !)…

« Survivant » m’a donc captivé de A à Z. Début sur des chapeaux de roues, le narrateur a pris les commandes d’un avion long courrier. Il a viré les passagers ainsi que les pilotes. Son but : se scratcher dans le désert australien. Mais avant de se scratcher, il va raconter « à la boite noire » comment il en est arrivé là…

Persos zarbis, atmosphère délétère (glauque ?), violence maximale, humour dévastateur, ce bouquin ressemble à une grenade qui vous pète à la gueule sans en avoir l’air. Plusieurs fois. Certaines scènes sont vraiment démentes, et c’est l’une des rares fois où je me suis demandé comment l’auteur avait fait pour imaginer de tels trucs. Je me suis aussi demandé si l’auteur, avec cet écrit qui ne ressemble vraiment à aucun autre et qui est inclassable, n’était pas majeur, à l’instar d’un Bret Easton Ellis (surtout pour American Psycho).

Bref, j’ai hâte de me pencher sur ses autres œuvres, notamment Monstres Invisibles que m’a aussi conseillé Thierry.

En tout cas, c’est un réel plaisir de tomber sur ce genre bouquin.

Si je le convertissais en geste technique, je dirais qu’il vaut bien une reprise de volée en pleine lucarne !

Non, deux ! Soyons pas pingre.

2021/12/31

Critique de « Nous sommes tous des playmobiles » de Nicolas Ancion par Franck Ribéry (Oh non encore du foot)

 

 


Franck Ribéry adore lire. A tel point qu’il souhaiterait que tous les ballons de football du monde entier soient recouverts de passages de romans ou de nouvelles. Pour l’instant, la FIFA n’a pas validé cette idée  mais, parait-il, l’étudie très sérieusement. « Peut-être mon transfert au Real Madrid accéléra les choses » ironise Franck qui connaît la force d’inertie des dirigeants de la haute instance de football. A défaut, pour OH NON ENCORE DU FOOT, le joueur nous fait part de ses impressions de lecture. Aujourd’hui le recueil de nouvelles de Nicolas Ancion « Nous sommes tous des playmobiles »

 

C’est marrant. Quand on apprécie un livre on a beaucoup plus de mal à en parler que lorsqu’on ne l’apprécie pas. Allez savoir pourquoi. Donc, j’ai apprécié ce recueil de nouvelles et l’ai lu pratiquement d’une traite. Bon, comme tout recueil de nouvelles, les histoires sont inégales. Certaines dégagent trop de bons sentiments et de morale telles la tache de sauce ou l’échappé belle. Il y a aussi la facile du pauvre type qui ne demande pas grand-chose à la vie, juste échanger avec une serveuse à jolis seins. Et puis la chiante sur le monde littéraire – bien écrite néanmoins et qui donne envie d’aller voir Bruxelles – deux types raptent un autre de l’académie française et lui font subir, entre autre, des outrages de vocabulaire. Et puis il y a des petits joyaux dont, principalement « Georges et les dragons », qui est paradoxalement celle qui utilise le moins « l’exceptionnel ». Enfin, la dernière histoire « Haute pression », superposition haletante de plusieurs récits qui éclaire la vie sur son absurdité.

Ceci dit, l’écriture de Nicolas Ancion est celle d’un véritable écrivain. Même si certaines nouvelles sont sans plus (mais cela est normal), le recueil se lit aisément et dans n’importe quelle position (si, si). Plus que les histoires, ce sont les mots de l’auteur qui entraînent. Et puis Nicolas Ancion est un enfant de la bédé et cela se voit. Maniant à merveille l’art du décalage, il multiplie (j’évite comme les petits pains) les images saugrenues et burlesques. Bref, enfin un auteur qui pète normalement. Un auteur à l’écriture simple et fraîche ! Un auteur qui mérite vraiment d’être lu. Je suis d’ailleurs curieux de lire ses autres œuvres… et aussi de visiter Bruxelles.