Ils entrèrent dans un studio sobrement
décoré. Une odeur de propre flottait dans le lieu comme si le ménage avait été
fait juste avant leur arrivée.
Élodie déposa son sac au pied du clic-clac et
récupéra sur la table basse un mug contenant un fond tiède de thé au citron.
- S’xcuse moi pour le bordel.
Il remarqua alors l’étagère occupant un pan
entier de mur, garnie de bas en haut de DVD. Il devait y en avoir plus de deux
cent.
- Comment fais-tu pour attraper ceux près du
plafond ?
Elle alluma le lecteur DVD et la télé.
- J’attends qu’ils tombent. Je t’en prie,
mets-toi à l’aise.
Tout en se délestant de sa veste, il fixait
toujours les DVD au-dessus de lui s’imaginant leur chute à la manière des
feuilles d’automne.
- Je suppose que moins tu aimes les films
plus tu les ranges en hauteur.
- J’aime tous les films qui sont ici !
répondit-elle avec agressivité.
Cette réaction abrupte le refroidit. Il
s’abstint d’émettre une nouvelle remarque sur les DVD inaccessibles.
- Tu veux boire quelque chose ?
demanda-t-elle d’une voix mielleuse.
- Pas de refus.
Elle disparut dans la cuisine.
Il s’approcha de l’impressionnante collection
à la recherche d’un film qu’il avait déjà vu. Tiens, Fight Club. Il le prit et
l’examina sous toutes les coutures. Deux croix avaient été inscrites au feutre
noir et sur un coin de la jaquette. Il la rangea et prit le suivant, Seven.
Quatre croix formaient une ligne au même endroit. Était-ce une note ?
- Tu aimes David Fincher ?
Elle lui tendait un verre de vin rouge. Sous
l’éclairage multiple et indirect son visage paraissait parfaitement lisse et
ses lèvres charnues appétissantes comme des bonbons.
- Ouais, Seven c’était super.
- Fight Club reste son meilleur film,
asséna-t-elle péremptoirement.
Les notes étaient donc à interpréter dans
l’autre sens. Moins Elodie mettait de croix plus elle trouvait le film bon.
Elle tira les rideaux, faisant disparaître
l’immeuble voisin dont la majorité des fenêtres étaient noires et s’installa à
côté d’Étienne.
- Aux chefs d’œuvres ! dit-elle avec
emphase en cognant son verre contre le sien.
Ils burent puis regardèrent l’écran du
téléviseur sur lequel s’affichait le menu du film.
S’emparant de la télécommande, Elodie
sélectionna la version originale sous-titrée et l’enclencha.
Le film paraissait encore plus chiant au
deuxième visionnage. Cependant Éienne était tellement excité par la présence d’Élodie
qu’il ne ressentait pas la fatigue. Il lui jetait parfois des coups d’œil de
biais tout en approchant subrepticement sa main de sa cuisse. Elle, demeurait
imperturbable. Les yeux rivés sur l’écran, elle entrouvrait de temps à autre la
bouche et frissonnait. La main d’Étienne atteignit son objectif. Aussitôt, il
la fixa. La lumière bleue que l’écran projetait sur son visage lui donnait un
air menaçant, terrible. Comme si toute sa colère s’y était concentrée, prête à
une explosion dévastatrice. Il retira sa main, penaud. À sa grande surprise elle
sourit puis lui caressa l’entrecuisse. « Laisse toi faire »
murmura-t-elle en s’agenouillant entre ses jambes.
Interdit, c’était maintenant lui qui gardait
les yeux fixés sur le film. Elle le suça d’abord doucement, léchouillant son
gland avec la pointe de la langue. Puis elle avala son membre entièrement.
« Putain » gémit-il.
Tout en le branlant, elle poursuivit sa
savoureuse pipe. Il ne savait plus où il était et qui il était. Les cuisses
écartées, il se laissait aspirer, chambouler par la bouche insatiable et gourmande d’Élodie.
Leurs regards se croisèrent et son sexe trembla.
« Sur mes lunettes ! »
hurla-t-elle « Mes lunettes ! ».
Obéissant, son sperme s’étala en plusieurs
jets fougueux où elle avait exigé.
Elle poussa un cri de joie puis posa sa
monture sur la table basse.
Le visage extatique, Étienne chercha à
l’embrasser mais elle le repoussa.
« Bin quoi ? » fit-il,
désarçonné.
Elle ne répondit rien extirpant un appareil
photo de son sac et se positionnant face à ses lunettes.
« Non… ne me dis pas que tu vas… ».
Le flash aveuglant de l’appareil
l’interrompit. Il se ratatina, fébrile. Apparemment satisfaite de sa photo,
Elodie se remit à sa place, nettoya méticuleusement ses lunettes et les chaussa
à nouveau. Elle prit ensuite la jaquette du film et avec un feutre de noir y
inscrivit une croix. Une musique grandiloquente retentissait dans la pièce.
Elle la baissa légèrement, reprenant son air impassible.
FIN